La plateforme française Koregraf, spécialisée dans le crowdfunding immobilier, a cessé ses activités en 2025. Fondée en 2014, elle faisait partie des pionnières d’un secteur en plein essor. Son modèle séduisait les investisseurs particuliers désireux de financer des opérations immobilières en échange de rendements alléchants. En une décennie, Koregraf a collecté près de 80 millions d’euros pour 80 projets, avec un taux de rendement moyen proche de 9 %.
Mais la mécanique s’est grippée. Plusieurs retards de remboursement, des tensions dans la promotion immobilière, et une conjoncture de plus en plus incertaine ont sapé la confiance. Début 2025, Koregraf a suspendu la collecte de fonds. Quelques semaines plus tard, le couperet est tombé : fermeture définitive de la plateforme.
Koregraf au cœur d’un marché sous pression
La disparition de Koregraf n’est pas un cas isolé. Elle illustre un phénomène plus large. Le crowdfunding immobilier, dopé par des années de taux bas, affronte aujourd’hui un changement de paradigme. L’augmentation brutale des taux directeurs par la BCE, conjuguée à l’inflation persistante et au durcissement des conditions de crédit bancaire, a fragilisé toute la chaîne de production immobilière.
Les promoteurs ont vu leurs coûts grimper. Les délais de livraison se sont allongés. Les marges se sont érodées. Le nombre de programmes neufs lancés a chuté en France comme en Allemagne ou en Espagne. Résultat : les retards de remboursement aux investisseurs se multiplient. Le taux de défaut, longtemps contenu sous les 2 %, dépasse désormais 8 % sur certaines plateformes.
Les signaux d’alerte étaient là
Depuis 2023, Koregraf avait connu plusieurs alertes. Plusieurs projets avaient accusé des retards significatifs. Certains remboursements s’étaient faits partiellement ou avaient nécessité des prolongations non anticipées. En parallèle, l’équipe dirigeante s’était réduite. Les publications sur les réseaux sociaux et les canaux d’information devenaient sporadiques.
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Dans ce contexte, l’arrêt des nouvelles levées de fonds en janvier 2025 a été le signal final pour les investisseurs attentifs. Certains dossiers, encore en cours de remboursement, restent en suspens. Aucune procédure collective n’a été officiellement lancée, mais les chances de recouvrer l’ensemble des fonds engagés sont minces pour les projets en difficulté.
Des conséquences immédiates sur la confiance
La fermeture de Koregraf va au-delà d’un simple fait divers entrepreneurial. Elle affaiblit la confiance des investisseurs dans le modèle du financement participatif immobilier. De nombreux particuliers, séduits par des rendements à deux chiffres, prennent désormais conscience des risques structurels de ces placements.
La régulation, pourtant renforcée en 2023 avec l’entrée en vigueur du Règlement européen sur les services de financement participatif (ECSP), ne suffit pas à prévenir les risques liés aux défaillances des opérateurs ou des projets. L’autorité des marchés financiers (AMF) et son équivalent européen devraient intensifier leurs contrôles dans les mois à venir.
Reconfiguration du secteur en Europe
La chute de Koregraf accélère un mouvement de consolidation. Seules les plateformes les mieux capitalisées et les plus transparentes survivront. En France, des acteurs comme Homunity, ClubFunding ou Raizers cherchent à renforcer leur assise, soit en resserrant leurs critères de sélection, soit en diversifiant leurs sources de financement.
À l’échelle européenne, certains opérateurs allemands et néerlandais envisagent une expansion vers les marchés francophones, profitant de l’espace laissé vacant par Koregraf. Des synergies pourraient émerger entre plateformes, banques traditionnelles et promoteurs régionaux, pour proposer des offres plus sécurisées et co-financées.
Koregraf: Une fin qui appelle un nouveau départ
Koregraf s’éteint, mais son parcours aura marqué une décennie de transformation du financement immobilier. Sa fin rappelle que l’innovation financière ne suffit pas sans solidité opérationnelle. L’heure est venue pour les plateformes survivantes de repenser leur mission, d’assainir leur portefeuille et de reconstruire la confiance, projet après projet.